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Les pensées font leurs drôles de vies

23 mars 2021

L'art

Certains événements de la vie quotidienne recèlent une joie insoupçonnée. Surprendre un inconnu dans un instant d’égarement par exemple. J’en aperçois un la quarantaine grisonnante, suspendu dans la contemplation des immenses fleurs roses de la résidence,...
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8 juin 2021

Aquarium

Aquarium

8 juin 2021

Dog (collage)

Dog

8 juin 2021

tableau de l'homme : "The Emancipation Tracksuit" , 2019 (collage)

Image1

25 novembre 2020

Mauvais accordage - Sublimation

Il me semble que lorsqu’une personne est agitée par une énergie intense et positive, elle suscite parfois chez l’autre un repli : l’autre n’est pas excitable à ce moment, la nourriture qu’on lui envoie est trop chargée par rapport à son état actuel. Il y a barrage, et les lames de vie envoyées par l’agité se cassent sur la peau du calme, qui vient de se durcir.

C’est un mécanisme de protection : voyant un autre plus heureux, associatif, vivant que soi, quelque chose en lui tente de se remettre en question… Mais le cerveau, à l’ombre du faisceau de la conscience, se charge de préserver le Moi de l’affront. Pour réduire la dissonance cognitive, rien de tel qu’un bon coup de pied au cul dans l’un de ses protagonistes.

L’agité, lui, finit parfois par comprendre qu’il est seul dans son enthousiasme. Et toute la vie qu’il envoie, à coup d’idées passionnées, de lyrisme incontrôlé, tout tombe par terre. Alors qu’il attend l’autre comme un mur rebondissant sur lequel ses balles viendraient se charger de nouveaux éléments, les balles tombent au sol. Désemparé, il oscille entre la colère devant cet autre indifférent, qui tente de lui gâcher sa félicité, de l’autre il réalise (parfois) que cette agitation, est ce qu’elle est justement : une tension, un débordement.

Sa façon de l’envoyer aux autres, comme autant de fléchettes en quête de cible, sont probablement trop pointues, trop rapides, trop piquantes. La cible en est toute perturbée. Elles viennent rompre son équilibre interne, ou du moins le troubler. Il y a menace. 

L’électron libre envisage brièvement l’idée de s’apaiser, d’accepter ce flux émotionnel sans chercher à le partager, à le contenir en soi. Mais c’est difficile. La ferveur de tels torrents est grisante. Elle crée des ponts entre les chemins de pensées, crache sur les réserves timides. Porte fièrement l’espoir du sens, et de l’accomplissement possible. D’autant qu’il sait que cette fougueuse disparaîtra bien vite. Avec le temps, il a appris à se connaître même s’il est jeune encore. Alors, comment résister ? Il veut parler de toutes ces choses qui le font vibrer, car à cet instant le soleil brille dans son esprit, et double le rendement d’activité électrique positive de son cerveau.

Mais peut-être n’adopte-t-il pas la bonne stratégie. Peut-être devrait-il s’assoir, prendre un stylo, se recueillir un instant et puis obliger l’énergie à s’écouler par un seul chemin. Ainsi, elle ne fuirait pas de toutes parts. Concentrée en une trajectoire définie, elle pourrait devenir plus forte encore. Et elle pourrait se transformer. Plus tard, l’agité ne ressentirait pas la frustration d’avoir laissé s’échapper quelque chose de beau. Sublimation.

Oui, se dit-il. Je vais aller prendre de quoi écrire. Il s’est mis en mouvement mais il réalise aussitôt que la tempête joyeuse s’en est allée, sans crier gare.

                                                                    Maïa Camus® (Image protégée par le copyright)                        

                                

                   Dessin de Maïa Camus ® (image protégée par le copyright)

 

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21 novembre 2020

Petite chose

Une petite chose, haute comme trois pommes, déambule dans la résidence, suivie de près par son protecteur, et un engin servant à transporter le dit minuscule roi. Armé de la curiosité la plus simple, il s’est mis en quête d’exploration. Docile, le garant de sa sureté le suit au pas près, observant visiblement avec amusement le désir naïf du petit roi.  Alors que sa taille devrait le confiner au monde des fourmis, ou des crottes de chien par terre, à la limite, le voici qui lève son regard plus haut que tous les passants désintéressés. C’est le seul à me remarquer, au premier étage, et qui paraît entendre ma musique. Je croyais pourtant que du Rachmaninov aurait su rassembler les cœurs, mais les oreilles d’adultes ne semblaient pas en tenir compte. La trajectoire illogique du petit ‘om me semble pure et honnête. A côté de lui, je vois de plus grands êtres qui s’appliquent à ne pas perdre un mètre inutilement, en calculant l’angle de leur virage avec précision. Un chemin linéaire ? Quel mensonge nous faisons-donc à nous même ? Si nous ne cherchions pas tant à nous rassurer, nous assumerions notre chemin étrange, pleins de détours inutiles. Quelle étrange façon de grandir que de se contrôler jusque dans le chemin d’une promenade que nous faisons !

Mais enfin, les petites choses sont protégées de la plus vile des surveillances : celle des autres grands hommes. Nous le savons bien : nous nous surveillons nous même… Notre esprit, à notre insu, scanne sans cesse les comportements étranges, et s’il en aperçoit un au fond de sa perspective, alerte notre conscience. Il ne faut pas trop nous en vouloir. C’est un mécanisme de survie. Notre heuristique est simple : les êtres qui réalisent des actes étranges sont susceptibles d’être dangereux.

Depuis le rebord du bassin, que la petite chose a vaillamment enjambé, enhardi depuis sa dernière chute, le ptit’om se retourne vivement, en me regarde. Il vérifiait que j’étais toujours là. Après avoir échangé un signe (« coucou »), il se détourne. En voilà enfin un qui est un peu alerte ! Il veille au grain. Prudemment, il descend de cette minuscule marche, son gardien sur ses traces, et s’approche d’une fleur orange. C’est vrai qu’elle est jolie. Je l’avais remarquée moi aussi. Pour donner libre cours à sa contemplation, il s’assoit par terre. Mais il aperçoit bien vite quelque chose au loin. Il se relève, le gardien s’empresse de remettre en marche l’engin de transport du petit roi qui s’en va butiner ailleurs.

20 novembre 2020

Coronavirus - 2ème vague - Jour XX

Je sors pour aller à la bibliothèque. Une vieille dame masquée m’arrête aussitôt : « Vous avez votre justificatif, Madame ? Car les policiers sont là, ils vérifient, ils ont raison ! Et oui, c’est bien normal (j’ai à peine besoin d’acquiescer, elle poursuit son monologue), et ben qu’est-ce qu’ils croient les gens, il faut protéger l’autre, et oui ! ». Bonjour la culpabilisation, chouette ambiance. Là où je la rejoins, c’est qu’il n’y a aucune raison que nous, les richous de Boulbi soyons exemptés de contrôles par rapport à d’autres quartiers.

Effectivement, aujourd’hui, je vois des voitures de police qui patrouillent, jusqu’au soir (car je suis allée rejoindre un ami sur un banc, dépassant à la fois l'unique kilomètre prescrit et l'heure de balade autorisée, que d’inconscience de ma part). On ne m’enlèvera pas de la tête que c’est une ambiance de répression autoritaire. On nous empêche de le dire, car le disant, nous sommes inconscients, nous sommes immatures, imperméables à la conscience collective. « Cela vous retombera dessus, lorsque vous aurez besoin d’aller aux urgences, et qu’on ne pourra pas vous accueillir parce que les lits seront entièrement pris par les covidés. Ou quand l’un de vos proches mourra, ou quand un ami perdra son père. »

Il y a cependant un problème de communication certain entre les politiques et son peuple, car sinon, nous le peuple, accepterions sans protestation les injonctions de prudence, car nous comprendrions que cela est véritablement dans l’intérêt de la population. Mais trop d’incohérences, de règles arbitraires, d’incompréhensions ont terni cette confiance déjà ténue.

Je poursuis donc mon chemin jusqu’à la bibliothèque. Un vigile à l’entrée. Je dois montrer mon justificatif de place réservée en bibliothèque, et ma carte étudiante. Si je ne montre pas ma carte, je dois montrer mon certificat de scolarité ET ma carte d’identité. Mieux vaut être trop prudent que pas assez... Cette laide faculté il est vrai, ferait un endroit parfait pour des attaques terroristes ! Car elle est tellement vide qu’au moins, on aurait beaucoup de chance d’y faire peu de blessés.

Encombrée par mon sac trop lourd d’affaires que je ne vais pas utiliser, mon téléphone dans une main, j’ai l’impression d’entrer dans un aéroport. Et on vérifie les sacs. Enfin, je peux pénétrer les couloirs de notre chère fac, laissée à l’abandon.

Mais les contrôles ne sont pas terminés, allons bon… Nous sommes quand même des étudiants désireux d’aller travailler, il faut toujours se méfier ! Réserver sa place. Puis confirmer sa réservation. Là seulement, la bibliothécaire sera en mesure de valider ma présence – que de précautions nécessaires pour aller poser ses fesses dans une bibliothèque de centaines de places (en tenant compte des mesure de distanciation, cela va de soi), presque entièrement vide. Attention, dernier contrôle, une pièce d’identité pour vérifier que notre tête corresponde bien à la photo. Ainsi, si une amie veut, ô comble de rébellion, aller travailler sans être inscrite à la fac, on sera en mesure de lui refouler l’entrée. Car vraiment, trop de prudence n’a jamais fait de mal à personne. Toutes les lumières de la bibliothèque sont allumées, pour un minimum de personnes occupant ses places. Vive l’écologie.

L’administration m’étonnera toujours par sa connerie implacable. 

Mais bon, nous avons de la chance, nous les étudiants. Car les vieilles personnes en EPHAD ne sont pas autorisées à voir leurs proches malgré les dires du président. Au lieu de mourir du covid (oui je dis DU covid et non de LA covid, car cela ne sonne pas bien au féminin, nous sommes bien d’accord), ils mourront de solitude.

 

 

20 novembre 2020

Point noir

Kandinsky, Une courbe libre vers un point. Résonnance de courbes géométriques, 1925 

 

 

The Met CollectionParler beaucoup pour combler le vide.

Taire le silence me murmurant

Leitmotiv lancinant,

Déconnectée, Inachevée.

 

Retour d'un état antérieur,

Camouflé, oublié.

Comprendre les fondamentales,

Les mal-aimées, les déguisées.

 

Oiseau de nuit,

Perdu dans ses fantasmes.

 

J'ai gravé dans ma peau ce point noir.

Il doit me rappeler

De faire taire mes pensées.

20 novembre 2020

Kandinsky, Contrepoids, 1926

Kandinsky, Contrepoids, 1926

kandinsky angle

20 novembre 2020

Transports en communs

Je me balade en ville, et je nous regarde, nous humains, espèce pullulante, rats des villes, grouillants comme une fourmilière, des sardines en boites, des animaux en cage dans des barres de métal moches, mais avec, attention mesdames messieurs ! , cette néanmoins CONSCIENCE DE NOUS MÊME, censée nous différencier de toutes ces pauvres espèces, que nous méprisons, écrasons du pied, de nos obus de pollution, mais quelle arnaque fantastique ! Nous nous croyons tellement supérieurs. 

Dans le réseau souterrain, une forte densité de spécimens humains est rassemblée, et puisqu’il n’y a que ça à regarder, puisqu' on n’autorise toujours pas l’art là où, par tous les saints, il serait nécessaire pour s’évader, (Keith Herring où es-tu,) alors on scrute ces visages humains, et quand on s’applique et qu’on se concentre, ils deviennent étranges.

Comme quand on répète indéfiniment un mot, jusqu’à ce qu’il perde son sens. La répétition nous rend sa vraie nature, un ensemble de sons assemblés, qui n’est plus relié à rien d’autre. Parfois, quand j’examine les gens, mal aidée par les lumières agressives et trop blanches des souterrains puants, la 100ème poche sous les yeux, le 103ème nez biscornu, le 104ème bout de crâne que j’aperçois sous la chevelure me rend l’humain à ce que nous sommes : une espèce étrange, et pas franchement jolie.

Nous devons bien reconnaître que dans le panel immense d’espèces vivantes qu’abrite la Terre, nous nous situons facilement dans le dernier quart en termes de beauté. Bon… se tenir sur les deux pattes nous confère une certaine classe, c’est vrai… Mais à part ça vraiment… L’évolution nous as même enlevé nos poils. Nous sommes des peaux vulnérables, tendues sur un corps rectiligne, avec pas même une petite plume à l’arrière de la nuque pour un soupçon de fantaisie.

Garder un certain espace vital dans ce genre de carlingue à la lumière d’hôpital est un défi de chaque instant, surtout quand on mesure 1m60. Certaines personnes, décident simplement d’ignorer mon petit corps et pressent leurs fesses là où se trouve en fait mon ventre (je tiens à préciser que ce type de harcèlement sexuel provient généralement des femmes). Au fur et à mesure de mon expérience des transports en communs, j’ai développé des tactiques un peu plus dignes que celles des débuts, où je soupirais en postillonnant pour signifier mon mécontentement -ou au moins ma présence-. Maintenant, je raffole de mon index se plantant en plein milieu d’un dos avant que celui n’arrive à moins de quelques centimètres de mon visage. C’est une sensation très désagréable, je ne sais pas si on vous l’a déjà fait, qui stoppe généralement immédiatement la personne dans sa lancée. Elle se retourne en vous lançant un regard mi-surpris mi-désolé si vous avez de la chance, parfois mi-énervé, mais ça, ça ne me dérange pas, parce que je suis souvent énervée moi aussi. 

Comme je ne suis que quelqu’un comme les autres, je sors souvent, comme tout le monde, aux stations de changements. Là aussi, c’est tout un art de se faufiler dans ces masses humaines (mal)adroites le plus rapidement possible.

Pourquoi ? Suis-je réellement à quelques minutes près ?

Enfait, puisque je suis très souvent en retard, oui. Néanmoins, même quand je ne le suis pas, c’est devenu comme un jeu mario :  anticiper les obstacles, accélérer la cadence au bon moment quand l’espace le permet. Je double par la droite, dans le métro (j’ai toujours dit que la conduite à droite n’avait rien de naturel – étonnement, je n'ai pas encore eu mon permis). Parfois, un large duo de touristes, insouciant à cette agitation ambulante, se met à ralentir le flux, et notre corps, docile, ralentit lui aussi. Mais il est prêt à bondir, et au moindre espace libéré, le voilà qui se remet à filer. Cette fois-ci je dois dire que ma corpulence marche plutôt en ma faveur.

Ainsi nous voilà à peu près tous à aller aussi vite que possible dans ses souterrains à rallonge, dépassant quelques sans abris puants, que personne ne regarde. Ils dorment là, ceux-là, et sont assez bien organisés, ils ont délimité de petits espaces avec des cartons, leurs affaires sont rangées là, près du mur, et tous les deux ne regardent pas cette foule de gens qui passe sans cesse, du matin au soir. C’est le monde actif, et eux c’est les sans faction. La dernière fois, l’homme agenouillé agitait son index en direction du sol, comme s’il lui parlait, et je me suis dit que ce cher sol devait se jouer de lui. Il faut dire qu’ils sont installés à un endroit en pente, ce qui doit être franchement déstabilisant selon votre état d’anémie, d’alcoolémie, ou d’hypothermie. Je ne sais pas s’ils se sont installés là parce que c’est l’endroit où il y a le moins de courants d’air, ou si c’est l’endroit où on les vire le moins.

Pendant les changements, dans ce flot humain déambulant, je croise parfois des regards. D’un coup quelqu’un sort de l’anonymat, et me plante ses deux yeux dans les miens. Ca fait tout drôle, car on sait bien que dans ces endroits, on enfile tous un masque de distance ; il ne faudrait pas qu’en plus de tous ces désagréments -l’odeur, la lumière, le monde-, il faille communiquer, bon dieu !  On est là, tous serrés les uns aux autres, mais on ne le veut pas. On demande qu’à respirer, nous. Seulement la ville en a décidé autrement.

Nous, les créatures grouillantes. On a l'air fatigué. Il y en a qui dorment en tenant leur tête bien droite ou en l’apposant contre la vitre sale. D’autres regardent, stoïques, un point fixe avec leurs écouteurs dans les oreilles. Certains en revanche -mes préférés-, ne masquent pas la vie qui les habitent. 

Ils parlent trop fort (sans s’en apercevoir, ceux qui se donnent en spectacle en traquant mine de rien le moindre signe d’attention de la part d’autrui sont insupportables.). Ne remarquent pas les regards désapprobateurs que des passagers aigris jettent sur eux. Laissent échapper tout haut quelques marmonements gracieux : « Putain… : fait chier ! *Fouille dans son sac* Merde… Il est où… Ah ! », puis commencent à se brosser les cheveux avec énergie. Leurs yeux arpentent l’environnement sans trêve. Ils sont bien différents des personnes appartenant à la catégorie des "regards-vides", une espèce très répandue dans le milieu des transports en commun.  Pour ceux-là, un regard est un affront : pris au piège, ces spécimens crient silencieusement : « Merde, un regard ! ». « Vous me collez à la mallette, oui, mais pas question d’admettre que vous existez ! », semblent-ils dire encore.

Quand c’est enfin la station finale,  j’enjambe deux à deux les marches avec souplesse (même si depuis quelques temps, il arrive que mon genoux ou ma cheville faillisse, la vieillesse arrive). Jusqu’à présent, personne ne m'a encore doublée, je suis imparable à cet exercice. Je double par la gauche cette vieille dame qui peine mais qui a l’air de ne pas vouloir être aidée, et je gravis avec une pointe de soulagement les dernières marches qui me mènent à l’air libre (même si pollué).

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