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Les pensées font leurs drôles de vies
20 novembre 2020

Coronavirus - 2ème vague - Jour XX

Je sors pour aller à la bibliothèque. Une vieille dame masquée m’arrête aussitôt : « Vous avez votre justificatif, Madame ? Car les policiers sont là, ils vérifient, ils ont raison ! Et oui, c’est bien normal (j’ai à peine besoin d’acquiescer, elle poursuit son monologue), et ben qu’est-ce qu’ils croient les gens, il faut protéger l’autre, et oui ! ». Bonjour la culpabilisation, chouette ambiance. Là où je la rejoins, c’est qu’il n’y a aucune raison que nous, les richous de Boulbi soyons exemptés de contrôles par rapport à d’autres quartiers.

Effectivement, aujourd’hui, je vois des voitures de police qui patrouillent, jusqu’au soir (car je suis allée rejoindre un ami sur un banc, dépassant à la fois l'unique kilomètre prescrit et l'heure de balade autorisée, que d’inconscience de ma part). On ne m’enlèvera pas de la tête que c’est une ambiance de répression autoritaire. On nous empêche de le dire, car le disant, nous sommes inconscients, nous sommes immatures, imperméables à la conscience collective. « Cela vous retombera dessus, lorsque vous aurez besoin d’aller aux urgences, et qu’on ne pourra pas vous accueillir parce que les lits seront entièrement pris par les covidés. Ou quand l’un de vos proches mourra, ou quand un ami perdra son père. »

Il y a cependant un problème de communication certain entre les politiques et son peuple, car sinon, nous le peuple, accepterions sans protestation les injonctions de prudence, car nous comprendrions que cela est véritablement dans l’intérêt de la population. Mais trop d’incohérences, de règles arbitraires, d’incompréhensions ont terni cette confiance déjà ténue.

Je poursuis donc mon chemin jusqu’à la bibliothèque. Un vigile à l’entrée. Je dois montrer mon justificatif de place réservée en bibliothèque, et ma carte étudiante. Si je ne montre pas ma carte, je dois montrer mon certificat de scolarité ET ma carte d’identité. Mieux vaut être trop prudent que pas assez... Cette laide faculté il est vrai, ferait un endroit parfait pour des attaques terroristes ! Car elle est tellement vide qu’au moins, on aurait beaucoup de chance d’y faire peu de blessés.

Encombrée par mon sac trop lourd d’affaires que je ne vais pas utiliser, mon téléphone dans une main, j’ai l’impression d’entrer dans un aéroport. Et on vérifie les sacs. Enfin, je peux pénétrer les couloirs de notre chère fac, laissée à l’abandon.

Mais les contrôles ne sont pas terminés, allons bon… Nous sommes quand même des étudiants désireux d’aller travailler, il faut toujours se méfier ! Réserver sa place. Puis confirmer sa réservation. Là seulement, la bibliothécaire sera en mesure de valider ma présence – que de précautions nécessaires pour aller poser ses fesses dans une bibliothèque de centaines de places (en tenant compte des mesure de distanciation, cela va de soi), presque entièrement vide. Attention, dernier contrôle, une pièce d’identité pour vérifier que notre tête corresponde bien à la photo. Ainsi, si une amie veut, ô comble de rébellion, aller travailler sans être inscrite à la fac, on sera en mesure de lui refouler l’entrée. Car vraiment, trop de prudence n’a jamais fait de mal à personne. Toutes les lumières de la bibliothèque sont allumées, pour un minimum de personnes occupant ses places. Vive l’écologie.

L’administration m’étonnera toujours par sa connerie implacable. 

Mais bon, nous avons de la chance, nous les étudiants. Car les vieilles personnes en EPHAD ne sont pas autorisées à voir leurs proches malgré les dires du président. Au lieu de mourir du covid (oui je dis DU covid et non de LA covid, car cela ne sonne pas bien au féminin, nous sommes bien d’accord), ils mourront de solitude.

 

 

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Commentaires
D
Excellent texte, il m'a beaucoup fait voyagé. Je pense détecter ici une réelle plume, et une manière de décrire les situations de la vie très imagées, vivantes, piquantes. Continuez à publier surtout!
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